Discours de soutenance sur Le nantissement des biens incorporels en garantie du crédit

Monsieur le président du jury, honorables membres du jury, recevez avant 
tout propos, nos mots de bienvenu et de remerciement pour l’honneur que vous 
nous faites en acceptant de prendre part à cette soutenance afin d’évaluer nos 
travaux de recherche. De vive voix, nous disons un sincère merci au Professeur
AYEWOUADAN pour son encadrement dans l’élaboration de ce travail. Enfin, 
avec votre permission nous voudrions exprimer notre profonde gratitude à nos 
proches, amis et collègues de promotion et à tous ceux qui nous l’amitié de leur 
présence. 

M. le président du jury/honorables membres du jury Georges SAND dans Lélia, 
écrivait je cite « Depuis que j’existe ; je rêve les grandeurs du renoncement au faux biens de ce monde et la conquête des biens immatériels. » fin de citation.

Cette quête est tentante et sa perspective d’autant plus séduisante qu’aujourd’hui
l’immatériel impose partout sa présence, et en tant que richesse, il est au cœur de 
toutes les préoccupations. L’essor de l'immatériel est, tel que certains auteurs ont estimé que l’immatériel avait envahi nos vies. Les biens incorporels augmentent 
non seulement en nombre, mais aussi en variété et en valeur du fait d’une espèce 
de dématérialisation globale de la richesse. Et c’est cette montée en puissance de 
l’incorporel, comme composante de l’actif du patrimoine pouvant de ce fait garantir le crédit, qui a suscité notre intérêt. C’est donc la constitution des sûretés sur les biens incorporels que l’on a désignée par le vocable de nantissement ainsi qu’il ressort de la définition donnée par l’article 125 de l’AUS. Ce texte dispose en effet que le nantissement est « l'affectation d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en garantie d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à condition que celles-ci soient déterminées ou déterminables. Cette définition est issue de la réforme du droit des sûretés laquelle puise ses racines dans d’impérieuses considérations d’efficacité économique, et de modernisation des textes. Si le couple sûreté-crédit, est indissociable pour conjurer le risque d'insolvabilité du débiteur, cette liaison n'empêche pas toujours la survenance du risque. Et il se trouve, qu’affecter un bien incorporel en garantie d’une obligation n’est pas exempt de risque. Il faut pouvoir concilier ce droit sur les biens incorporels et la volatilité de leur valeur en rapport avec la réalisation de la sûreté. Ce qui nous emmène à poser la 
problématique de l’efficacité d’une sûreté dont l’assiette est constituée de biens 
dépourvus de consistance matérielle. Autrement dit, le nantissement des biens 
incorporels constitue-t-il une sûreté efficace ?

 Cette étude permettra d’apprécier 
l’attractivité du nantissement des biens incorporels en garantie d’une obligation 
par rapport aux sûretés concurrentes, ainsi qu’à apprécier son évolution.
L’analyse de cette problématique nous a permis de constater la relative efficacité 
du nantissement des biens incorporels. Ce constat, nous oblige à formuler des 
propositions de solutions en vue de participer au perfectionnement de l’efficacité
de cette sûreté. 

La relative efficacité du nantissement des biens incorporels


Disposer d’un cadre légal et incitatif permettant un accès facile au 
financement, tel était l’un des objectifs qui a commandé la réforme de l’AUS. 
C’est cette orientation vers la modernité qui explique l’importance des 
réaménagements apportés à l’AUS révisé. S’agissant plus particulièrement des 
sûretés telles le nantissement des biens meubles incorporels, l’on remarque des 
transformations non moins importantes. L’on relèvera sans doute le changement 
du critère de définition du nantissement, lequel aujourd’hui s’est plus ou moins 
émancipé du gage. Désormais, c’est la nature du bien qui commande son classement dans une ou l’autre des catégories. Les biens meubles corporels étant du ressort du gage, seule la nature incorporelle du bien permet d’accéder à la 
qualification de nantissement. En outre, l’adoption de ce nouveau critère
invariable dans le temps a entrainé l’extension de l’assiette du nantissement en ce qu’elle a permis la prise en compte de biens incorporels futurs comme objets de 
garantie sous réserve du respect du principe de spécialité. De l’aménagement des règles d’existence du nantissement à l’amélioration de ses modes de réalisation,
l’on perçoit clairement la volonté du législateur de rendre cette sûreté à la fois 
attractives et efficaces. La réorganisation de cette sûreté s’est faite aussi à travers 
le réaménagement du régime juridique des nantissements déjà existants. On s’est 
également félicité de l’accueil en droit OHADA, de nouvelles sûretés qui pour les 
unes, notamment le nantissement de compte bancaire, avaient déjà fait leurs 
preuves dans la pratique. Pour le nantissement de compte de titres financiers par contre, il s’agit de l’introduction d’un genre nouveau dans le contexte du droit 
OHADA. Au regard de tous ces changements, nul doute que le nantissement de biens incorporels présente nombre d’éléments de succès, qui militent largement en faveur de son efficacité. Cependant cette évolution contraste fort bien avec les différentes insuffisances relevées ici et là dans la construction de la théorie générale du nantissement des biens meubles incorporels. En effet, en dépit de la volonté du législateur de conférer une certaine autonomie au nantissement, celui-
ci n’a pas su lui créer opportunément un régime juridique totalement autonome.
Il ressort de l’analyse de la réglementation, une certaine tendance à l’adaptation 
du nantissement à la technique du gage d’un côté, puis de l’autre une présence 
marquée du régime du gage auquel il est fait renvoi pour certains biens 
incorporels. Pour les juristes habitués à des catégorisations, cela pourrait paraître 
quelque peu déroutant, le principe étant qu’à différence de nature, différence de 
régime. En cela, la question de l’opportunité d’une telle distinction finalement 
purement terminologique, reste entière. En outre, au registre des insuffisances l’on 
a déploré l’absence d’un régime commun à tous les nantissements ainsi que les imperfections que l’on pourrait qualifier de propres à une catégorie de biens 
incorporels. Les cas du nantissement de compte de titres financiers et du 
nantissement des droits de propriétés intellectuelles ont retenu notre attention dans le cadre cette étude. Le premier semble souffrir de l’inadéquation de son régime juridique alors que le second, traîne non seulement un formalisme excessif du fait de la double formalité d’opposabilité, mais aussi ne bénéficie pas d’un 
encadrement suffisant au cours de la période antérieure à l’échéance de la 
garantie. 
Ainsi, face à ce qui apparait comme une théorie du nantissement non encore 
aboutie, il a été proposé quelques modestes contributions.

Le perfectionnement de l’efficacité du nantissement des biens incorporels 

Monsieur le président du Jury, Messieurs les membres du jury, comme 
apport il a été préconisé d’abord de reformer l’ensemble des textes qui régissent ou interfèrent dans la règlementation du nantissement. Il s’agit en premier lieu de l’AUS, lequel devrait continuer son œuvre de libéralisation des modes de réalisation des sûretés, en levant l’interdiction de la clause de voie parée. Elle devrait l’être non seulement au nom de la liberté contractuelle mais aussi parce 
que le pacte commissoire, autrefois interdit pour des raisons similaires, est désormais autorisé. La prise en compte par le législateur des spécificités de crtains biens incorporels que sont les droits de propriétés intellectuelles et le compte de titres financiers, parait-elle aussi importante. La réforme du droit des sûretés emportera nécessairement celle du droit des procédures civiles d’exécution et du droit des entreprises en difficulté compte tenu des liens qui existent entre ces trois disciplines. D’apparence rigoriste, l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécutiond e l’OHADA (AUPSRVE) comporte non seulement un lourd formalisme mais aussi fait appel à un régime de nullité qui déroge au droit commun des nullités. 
Ce qui penche la balance de protection un peu du côté des débiteurs aux grand dam des créanciers. Cet état de chose, situe le droit des voies d’exécution actuel 
aux antipodes de la dynamique de souplesse insufflée par le législateur. Quant à l'Acte Uniforme portant organisation des Procédures Collectives d’Apurement du 
Passif (AUPC), celui-ci en dépit de la récence de sa révision, n’est pas non plus 
en phase avec la volonté d’amélioration du droit des affaires OHADA. Du fait des 
règles restrictives qu’il impose en cas d’ouverture d’une procédure collective 
contre le constituant, l’AUPC actuel ne réserve pas un sort assez favorable aux 
créanciers garantis par les sûretés classiques. Non seulement ils sont devancés par des créanciers super-privilégiés mais aussi l’encadrement insuffisant de la période de suspension automatique des poursuites risque de mettre en danger l’existence 
de leurs garanties. Sur un autre registre, il semblerait que les intérêts des parties 
pourraient être mieux protégés par la facilitation de l’accès à l’information. En 
cela, la création des Bureaux d'Informations sur le Crédit « BIC » dans la zone UMOA est à saluer. Aussi, l’extension aux autres pays membres de l’OHADA, 
voire l’appropriation de ce système d’information sur le crédit par l’Organisation est-elle souhaitable. L’existence d’un environnement juridique et judiciaire sécurisé étant un préalable indispensable à la création d’un climat propice au développement du crédit, cette préoccupation ne saurait être reléguée au second plan. Il en est de même de la promotion des pratiques de bonne gouvernance, qui du reste n’est pas moins importante. 

M. le président du jury, honorables membres du jury, au terme de cette 
étude et à l’heure du bilan, il apparaît clairement que le régime du nantissement
des biens incorporels, en dépit de son efficacité, reste indubitablement perfectible. 
Comme difficultés rencontrées nous relèverions que si la documentation 
était plutôt foisonnante sur la matière des sûretés, les informations étaient quelque 
peu ténues en ce qui concerne les garanties sur biens incorporels. 
Nous arrivons au terme de cette étude en ayant parfaitement conscience de 
ses lacunes et insuffisances. Ces résultats n’ont certainement pas un portée 
universelle et indiscutable. Seule l’application effective des solutions proposer permet d’éprouver leurs mérites. D’autres voies sont certainement à explorer. En 
cela, vos précieuses observations viendront enrichir notre travail.

Je vous remercie de votre attention


Primos Elogni GANGBAZO

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