Le Chef du gouvernement




                  













INTRODUCTION




« Les formes diverses que peut prendre le gouvernement des hommes découlent en grande partie de l’idée qu’ils se font de l’univers »[1]. Cette affirmation de Maurice Druon[2], traduit non seulement la relation qui existe entre les peuples et leurs gouvernements mais aussi, fait remarquer l’existence de plusieurs formes de gouvernement.
S’il existe diverses formes de gouvernement, il en va de même de leur premier responsable : le chef du gouvernement[3].
Il désigne la personne placée à la tête du gouvernement dans un État[4]. Il est, donc, celui qui dirige le gouvernement d’un État. Le gouvernement, quant à lui, est l’organe qui détient le pouvoir exécutif et qui administre une communauté humaine ou un État.
Si l’on peut faire remonter la naissance des gouvernements, et par ricochet la naissance de « leurs chefs » à l’époque où les hommes ont décidé de se mettre en communauté, c’est assurément à l’histoire moderne[5] que nous devons les ancêtres des gouvernements actuels. Il est à souligner que ces types de gouvernements qui existaient jadis, ont cédé la place, sous les effets du temps et des révolutions idéologiques et politiques[6], aux formes de gouvernement que nous avons de nos jours.
Quant aux jeunes États africains, dans leur grande majorité, ils ont été influencés par leurs anciennes métropoles. Aussi remarque-t-on que leurs organes et systèmes politiques ressemblent fort bien à ceux de leurs métropoles.
Tout en nous permettant de faire un tour, quoique sommaire, du droit constitutionnel comparé, la réflexion sur le chef du gouvernement est fort enrichissante à certains égards.
D’abord, elle permet de mettre en exergue la disparité qui existe entre les chefs de gouvernement quant aux prérogatives qui leurs sont échues par leurs constitutions ou leurs pratiques constitutionnelles.
Ensuite, transparaît une osmose entre le système politique appliqué dans un État et les compétences dévolues au chef du gouvernement de cet État. Aussi remarque-t-on que certains régimes politiques sont propices à l’émergence d’un « chef du gouvernement » détenant principalement ou exclusivement le pouvoir exécutif. D’autres se retrouvent composée des chefs du gouvernement, caractérisée par leurs subordinations politico-juridiques à une autre personne au sein du pouvoir exécutif[7].
Enfin, s’imposent, à tous les chefs du gouvernement quel que soit leurs statuts, des limites, lesquelles peuvent être inhérentes au système politique adopté ou liées aux principes de la démocratie et de la bonne gouvernance, notamment le principe de la séparation des pouvoirs.
Cependant, parler du chef du gouvernement surtout dans une dimension de systèmes constitutionnels comparés peut être gageure. Il en est ainsi non seulement du fait qu’il n’existe pas un archétype de « chef du gouvernement » mais aussi et surtout parce qu’ils forment un ensemble hétérogène.
Face à l’hétérogénéité et la disparité qui transparaissent dans leur statut, comment peut-on classifier les chefs de gouvernement ? Quel lien y a-t-il entre leur statut et la compétence qui leur est dévolue ?  Bref se posent essentiellement les questions de la classification et de l’étendue des pouvoirs du chef du gouvernement.
La classification des chefs de gouvernement, en réalité, peut s’effectuer autour de deux pôles : il existe des chefs de gouvernement qui font en même temps office de chefs d’État[8] tandis que d’autres se voient uniquement cantonner dans les fonctions de chefs de gouvernement. Il se révèle, quant à leurs compétences, deux catégories de chefs du gouvernement. D’un côté, nous avons des chefs de gouvernement qui détiennent l’essentiel, voire l’exclusivité du pouvoir exécutif[9]. Cette situation s’explique par plusieurs raisons notamment leurs modes de désignation, ainsi que le système politique dans lequel ils gouvernent. De l’autre côté, se trouvent des chefs de gouvernement qui partage, une bonne partie voire même, l’essentiel du pouvoir exécutif avec une autre personnalité de l’État. Ces chefs de gouvernement ont, par conséquent, un pouvoir restreint. L’explication de la restriction[10] de leurs prérogatives se trouve dans leurs statuts et aussi dans le système politique qui les régente.

La présente étude repose sur la disparité qui se révèle dans l’analyse des statuts et prérogatives dont disposent les chefs de gouvernement. Aussi analyserons-nous tour à tour leur typologie (I) et leur compétence (II).

I-                   La typologie des chefs du gouvernement.
Les chefs de gouvernement, en réalité, peuvent être classés en deux catégories. D’un côté, nous avons des chefs de gouvernement, chefs d’État (A) et de l’autre, se trouvent les chefs de gouvernement, Premiers ministres (B).

A-    Les chefs de gouvernement, chef d’État.
Les régimes politiques et les systèmes électoraux ont une incidence sur les statuts des chefs de gouvernement. On remarque une corrélation entre leur mode de désignation (1) et la stabilité de leur gouvernement (2).
1-      Le mode de désignation.
S’ils sont caractérisés par leur désignation à l’issue d’une élection au suffrage universel le plus souvent indirect, il existe principalement, en fonction des systèmes politiques, deux types de désignation des chefs de gouvernement qui sont à la fois chefs d’État. Ce qui nous fait avoir parmi les chefs de gouvernement, chefs d’État, en fonction de leur système électoral, deux grands blocs : les issus d’élection présidentielle (a) et les issus d’élection législative (b).
a-      Les issus d’élection présidentielle.
Les chefs de gouvernements qui sont issus d’une élection présidentielle sont également des chefs d’État. Cette situation est inhérente au régime présidentiel en ce qu’il prône la détention du pouvoir exécutif par une seule personne qui est donc à la fois le chef de gouvernement et le chef de l’État. L’exemple incontournable de ce système est le modèle américain.
Le Président des États-Unis[11] « est élu au suffrage indirect par interposition d’un collège de grands électeurs représentatif de l’électorat »[12]. Le choix du Président intervient, donc, au suffrage universelle, non pas direct, mais indirect, par un collège électoral composé, quant à lui, d’élus du suffrage universel[13]. Au sein de ce collège électoral, les grands électeurs de chaque État[14] sont en nombre égal au nombre de membres du Congrès dont dispose cet État[15].
Donc, le pouvoir exécutif a, à sa tête, le Président des États-Unis. « À lui, et à lui seul est confié tout le pouvoir exécutif de sorte qu’il est en situation, non seulement d’être un chef d’État, mais aussi d’être un chef d’administration, détenteur à ce titre du pouvoir gouvernemental »[16].Le pouvoir exécutif est donc exercé par le Président et lui seul. Le fondement de ce monopole de l’exécutif par le Président est constitutionnel. En réalité, l’article 2 de la constitution de 1789 dispose que : « Le pouvoir exécutif sera confié à un Président des États-Unis d’Amérique »[17]. Ainsi, le Président des États-Unis est aussi le chef du gouvernement[18] des États-Unis. Le gouvernement est sérié en département. À la tête de chaque département se trouve un secrétaire[19], nommé par le Président, de l’avis et du consentement du Sénat à la majorité simple, et responsable individuellement devant lui. La constitution ne méconnait pas leur existence puisqu’elle prévoit que le Président « peut demander l’avis écrit du principale responsable de chaque département ministériel sur tout sujet concernant la marche de son service »[20]. L’ensemble des secrétaires forme, avec le Président et le Vice-président, le Cabinet qui met en œuvre la politique présidentielle.
Il existe néanmoins des dissemblances quant à l’application du régime présidentiel puisque tous les régimes présidentiels ne ressemblent pas point pour point au modèle américain[21].
En dehors des chefs de gouvernement élus à une élection présidentielle, se trouvent ceux issus d’élections législatives.
b-     Les issus d’élection législative.
Il existe parmi les chefs de gouvernement qui sont aussi chef d’État, ceux dont le mode d’accession au pouvoir s’effectue par le biais d’une élection législative. Ils sont soit, élus par les parlementaires issus des élections ou, désignés comme tel parce que étant le chef du parti majoritaire au parlement à la suite de l’élection législative. De leur rang, figure le Président de l’Afrique du Sud.
Il est élu par les députés à l’Assemblée nationale[22]. Dans les faits, il s’agit d’une élection sans suspens, puisque les députés élisent le premier responsable de leur parti politique. Donc le véritable combat pour être le chef du gouvernement sud-africain se mène d’abord au sein de son propre parti avant de se confronter –toujours par l’entremise de son parti politique lors des élections législatives– aux autres chefs de parti.
Le chef du gouvernement sud-africain doit son élection aux députés[23]. Mais, cette réalité ne doit pas éclipser tout le travail qu’il effectue avant et au moment des campagnes relatives à l’élection législative.
En effet, les députés sont élus -normalement- sur la base d’un programme à la fois politique, économique, social et culturel, autour duquel ils ont « battu » campagne. Or ces programmes sont loin d’être individuel puisqu’ils sont issus des « officines » de leurs partis politiques.
Plus encore, il y a une forte implication des leaders de chaque parti politique dans l’organisation et le déroulement des campagnes au point d’en faire parfois une affaire personnelle. Certains parlementaires sont élus du fait de leur appartenance à un parti politique ou à la caution que leur donne le chef de leur parti politique.
Ainsi, si le Président de l’Afrique du Sud est fait par les députés. Il est aussi vrai que la plupart des parlementaires sont faits par lui. Ce système n’est pas le propre des États unitaires. Il en va de même dans certains États fédéraux à l’instar de la fédération du Brésil.
Au Brésil, le Président de la fédération est aussi le chef du gouvernement. Il est aidé dans ses fonctions par des ministres qui doivent être –comme le Président fédéral– soutenus par les parlementaires. Au cas contraire, le gouvernement, comme dans un régime parlementaire peut-être renversé par l’Assemblée nationale.
L’analyse révèle un lien étroit entre le mode de désignation des chefs de gouvernement qui sont aussi des chefs d’État et la stabilité qui caractérise leur gouvernement.
2-      La stabilité des gouvernements de chefs d’État.
La raison de leur stabilité se trouve dans leur légitimité populaire (a) ou dans leur majorité parlementaire (b).
a-      La légitimité populaire.
Les chefs de gouvernement élus à l’issu d’une élection au suffrage universel jouissent d’une réelle légitimité populaire. Cette légitimité populaire est ainsi donc le fruit de leur élection au suffrage universel.
La stabilité de leur gouvernement est dû, donc, à leur légitime au sein de leur population.
Ils ont, un programme politique et, des instruments administratifs et  juridiques à leur disposition pour l’accomplissement de leur mission.
Les chefs de gouvernement qui dispose d’une majorité parlementaire jouissent aussi d’une stabilité.
b-     La majorité parlementaire.
Se révèle, au sein du régime parlementaire et de ses avatars[24], l’importance de la majorité parlementaire. En réalité, dans ces systèmes, c’est la majorité parlementaire qui forme le gouvernement. Voilà pourquoi sont stable, les gouvernements qui disposent d’une majorité parlementaire stable.
À côté des chefs de gouvernement, chef d’État se trouvent une autre catégorie composée de chefs de gouvernement, deuxième personnalité du pouvoir exécutif.
B-    Les chefs de gouvernement, Premier ministre.
Leur étude repose, sur leur mode de désignation (1) et sur, l’instabilité qui les caractérise (2).
1-      Le mode de désignation.
Ces chefs de gouvernement sont, soit des chefs du parti majoritaire au parlement (a) ou désignés par le chef du pouvoir exécutif (b).
a-      Les chefs des partis majoritaires au parlement.
Les chefs des partis qui disposent de la majorité au parlement sont, dans des systèmes politiques qui fonctionnent comme un régime parlementaire, des chefs de gouvernement. Nous pouvons citer à titre illustratif le Premier ministre britannique qui demeure le prototype de cette catégorie de Premiers- ministre.
Il est automatiquement et sans aucun doute le leader du parti ayant remporté les élections législatives en Grande-Bretagne. Mais devenir le leader d’un des deux grands partis politiques[25] susceptibles, de gagner les élections et par conséquent, de fournir le Premier ministre n’est pas, quant à lui, automatique. Les règles qui gouvernent le choix du chef du parti conservateur ou du parti travailliste, ont une importance toute particulière. Pour s’en tenir au droit positif, elles sont différentes entre ces deux partis.
Au sein du parti conservateur, la règle fixée, depuis 1965 seulement, est l’élection annuelle du chef du parti par le groupe parlementaire. C’est la « conséquence de la vive réaction des députés de base (back benchers, littéralement, ceux des bancs du fond) à la possibilité choquante donnée à la Reine, en 1963, à la suite de la démission soudaine du Premier ministre MacMillan, de choisir, le même jour, entre leur candidat, le député Richard Butler, vice-Premier ministre, et Lord Home, paire du royaume depuis 1951, soutenu par le cercle des membres influents du parti, proches de la Cour[26]. »[27]
Il en va autrement, au sein du parti travailliste, depuis le congrès de Wembley[28]. En vérité, le chef du parti travailliste est désigné par un collège composé de député, mais à la hauteur de trente pour cent seulement, le reste est réparti entre délégués des syndicats (quarante pour cent) et mandataires des sections locales (trente pour cent).
Une fois devenu le leader de son parti puis le chef du gouvernement britannique –après que son parti ait remporté l’élection législative– le Premier ministre doit rester le chef de son parti pour pouvoir rester en fonction[29]. Dans le cas contraire, son gouvernement est renversé puis remplacé par celui du nouveau chef du parti majoritaire au parlement[30].
En dehors de cette catégorie, il existe une autre composée de Premier ministre désigné par le chef du pouvoir exécutif.
b-     Les nommés par les chefs d’État.
Il s’agit d’un ensemble hétérogène. On y trouve, d’abord, ceux qui sont élus par les parlementaires avant d’être nommé conformément à une procédure constitutionnelle comme le Chancelier allemand ; ensuite, ceux qui sont nommés en raison du soutien qu’il dispose au parlement[31] et, enfin, ceux dont la nomination relève du pouvoir discrétionnaire du chef de l’État[32].
Au rang des premiers, se trouve le Chancelier allemand[33]. Le Chancelier est le chef du gouvernement en Allemagne et est membre du gouvernement fédéral. Ce dernier est composé de ministres fédéraux. L’essentielle du régime politique de la République fédérale tient dans l’institution du chancelier fédéral. Aussi dit-on que « l’Allemagne a le visage du Chancelier »[34] puisque dans le cadre d’un parlementarisme fortement rationalisé, sans perspective de recours au referendum, national, l’« Allemagne se présente comme la démocratie du Chancelier, désigné et soutenu par la Diète fédérale[35] ».
Le mode d’élection du chancelier est défini par la loi fondamentale de la République fédérale[36]. En effet, le Chancelier fédéral, proposé par le Président fédéral[37], est élu sans débat par la majorité des membres de la Diète fédérale[38]. Il a la particularité de prêter serment constitutionnelle[39], devant la Diète fédérale, lors de sa prise de fonction[40].
Quant à la seconde catégorie, le Premier ministre de la cohabitation en France est une illustration[41]. En vérité, le Premier ministre français doit être issu de la majorité à l’Assemblée nationale afin d’être soutenu par cette dernière, la pratique constitutionnelle en France révèle qu’en période de cohabitation, le Président de la République nomme à l’Hôtel Matignon[42] le chef du parti majoritaire à l’Assemblée nationale ou la personnalité désignée par ce dernier[43].
Dans la dernière catégorie des chefs de gouvernement nommé de façon discrétionnaire par le chef de l’État, y figure le Premier ministre togolais. En effet selon l’article 66 de la constitution togolaise, « Le Président de la République nomme le Premier ministre ». Aucune obligation n’est faite au Président quant à la personne qu’il doit nommer. Le Président jouit alors d’un véritable pouvoir discrétionnaire en la matière. Plus en cours, la révocation du Premier ministre relève également de son pouvoir discrétionnaire[44]. Il en va de même du Premier ministre burkinabé[45] et du Premier Ministre français[46] par exemple.
Eu égard à leur statut, l’instabilité de leur gouvernement se révèle évident.
2-      L’instabilité des gouvernements de Premiers ministres.
L’obligation de disposer d’une majorité parlementaire (a) et la possibilité d’une révocation par le Chef de l’État (b) constituent les deux facteurs explicatifs de l’instabilité des gouvernements de Premiers ministre.
a-      L’obligation d’une majorité parlementaire.
Pour que tienne le gouvernement, il doit disposer d’une majorité au parlement. Dans le cas contraire, il est emporté par une motion de censure ou un vote de défiance. Or si le gouvernement tombe, son chef donc le Premier ministre, chute automatiquement.
L’effet contraire est possible. En effet, la démission ou la disparition du chef du gouvernement entraîne automatiquement la dissolution du gouvernement qu’il conduisait.
b-     La possibilité d’une révocation par le Chef de l’État.
La possibilité de révocation est une véritable épée de Damoclès pour, certains chefs de gouvernement et par ricochet, certains gouvernements ; d’autant plus qu’à cet effet les chefs d’État disposent d’une compétence discrétionnaire.
L’article 66 de la constitution togolaise dispose que « Le Président de la République nomme le Premier Ministre. » Et « met fin à ses fonctions ». On peut noter la similitude qui existe entre l’article précité et l’article 8 de la constitution en vigueur en France qui stipule que « Le Président de la République nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement ». Il est à souligner que la pratique constitutionnelle va à l’encontre de l’« esprit » de cet article puisqu’en réalité la plupart des démissions des Premiers ministres sous la Vème République semble être demandée par le Président de la République.
C’est au Burkina-Faso que la nature discrétionnaire du Chef de l’État s’est le mieux traduit dans la constitution. En réalité, l’article 46 de la constitution dispose que « Le Président du Faso nomme le Premier ministre et me fin à ses fonctions, soit sur la présentation par celui-ci de sa démission, soit de son propre chef dans l’intérêt supérieur de la Nation. ».

II-                La compétence des chefs de gouvernement.
Une véritable disparité se révèle dans l’analyse des compétences des chefs de gouvernement. En effet, nous avons des chefs de gouvernement qui disposent de compétences larges (A) tandis que d’autres ont des compétences restreintes (B).

A-    Les chefs de gouvernement aux compétences larges.
Dans cette catégorie, se trouvent les élus directs ou indirects du peuple (1). Mais l’élection est loin d’être la seule justification des prérogatives que leur octroie leur constitution ou la pratique constitutionnelle. En effet, l’apport des régimes politiques ne doit pas être négligé (2).
1-      Les élus.
Les chefs de gouvernement élus disposent généralement de pouvoirs larges en raison de leur élection (a). Cependant, ils ont, quelle qu’en soit leur prérogative, des limites (b).
a-      L’élection : une justification de la détention de compétences larges.
L’élection au suffrage universel est indéniablement la raison fondamentale qui explique les compétences que les constitutions ou les coutumes constitutionnelles ont dévolu à certains chefs de gouvernement.
Du fait de leurs élections, ces chefs de gouvernement ont, une réelle légitimité populaire et, une responsabilité politique à l’égard de leurs peuples[47].
Au rang de ces gouvernants élus et qui jouissent de prérogatives éminentes, nous pouvons citer à titre illustratif le Président des États-Unis[48], le Président de l’Afrique du Sud, le Premier ministre de la Grande-Bretagne, le Chancelier Allemand.
Mais, leur prérogative, quelle qu’en soit leur borne, n’éclipse pas les limites de leur pouvoir.
b-     Les limites.
Que les limites soient d’origine constitutionnelle ou coutumière, elles se fondent généralement sur un principe : la séparation des pouvoirs.
Elle est définie comme une théorie constitutionnelle par laquelle on évite la concentration des pouvoirs dans les mains d’une personne.
La construction théorique, la plus ferme et la plus subtile vient de MONTESQUIEU, dans l’Esprit des lois, publié en 1748. En effet, au chapitre 11 estampillé : «  des lois qui forment la liberté politique dans son rapport avec la constitution », il écrit : « tout serait perdu si le même homme ou le même corps des principaux, des nobles ou du peuple exerçait les trois pouvoirs, celui de faire les lois, celui d’exécuter les résolutions publiques et celui de juger les crimes et différends entre particuliers ». On aperçoit là et sans ambiguïté la condamnation, par MONTESQUIEU, de la confusion des pouvoirs. D’ailleurs il continue : « On peut craindre, en effet, que le même monarque ou le même sénat ne fasse des lois tyranniques pour les exercer tyranniquement … car c’est une expérience que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser… Je dirai que la vertu elle-même a besoin de limites.» Il propose, à cet effet, dans une phrase du chapitre 2 de l’Esprit des lois qu’ : « il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir.»
Son avis a été largement suivi puisque les Révolutionnaires français proclamaient déjà au XVIIIème siècle que : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution. »[49].
Aussi, dans les régimes présidentiels, la séparation entre les pouvoirs paraît nettement. Il en va autrement, quant au régime parlementaire. En effet, les liens entre l’exécutif et le législatif, dans ce régime, sont ténus. Ce qui pose la question de l’impact des régimes politiques. 
2-      L’impact des régimes politiques.
S’il semble évident que le régime présidentiel produise des chefs de gouvernement aux compétences larges (a), il est n’est pas très vite remarqué que le régime parlementaire, de nos jours, en fait autant (b).
a-      Le régime présidentiel : le « mono céphalique » américain.
« Le régime américain tel qu’il est habituellement systématisé l’est toujours à partir du modèle américain.»[50] Mise en place par la constitution[51] issue de la convention de Philadelphie, le régime politique américain est l’archétype du régime présidentiel. Dans ce régime, chacun des trois pouvoirs[52] est confié respectivement à trois organes fédéraux distincts et chaque pouvoir est très spécialisé.
 Le Président des États-Unis, conformément à l’article 2 de la constitution des États-Unis, a l’exclusivité du pouvoir exécutif. Et c’est bien évidemment qu’il dispose de pouvoirs larges. En effet, il dirige l’administration, a un pouvoir d’exécution de la constitution et des lois, conduit les relations diplomatiques, et, est le commandant en chef de l’armée.
Pour l’aider à remplir ses multiples fonctions, le Président dispose de l’Administration.
Cette dernière correspond, au sens large, à « l’ensemble des services de l’Union répartis en département  et des agences fédérales qui concourent à la gestion administrative des États-Unis »[53]. À la tête de chaque département se trouve un secrétaire, nommé par le Président, de l’avis et du consentement du Sénat à la majorité simple, et responsable individuellement devant lui. Ces secrétaires n’ont pas l’autonomie qu’ont les ministres dans le régime parlementaire. Ils ne sont que des conseillers et des exécutants de la politique du Président.
Cette réalité n’est pas uniquement celle des États-Unis. Il en va de même, toute proportion gardée, dans tous les États qui ont opté pour le régime présidentiel.

b-     L’impact du régime parlementaire.
Le régime parlementaire né en Grande-Bretagne est le résultat d’une longue évolution inscrite dans les faits et dans les mœurs politiques. Il s’est imposé au 19ème siècle dans la plupart des démocraties européennes[54].
Dans sa conception traditionnelle, le régime parlementaire est un régime de collaboration des pouvoirs, qui contribue à l’équilibre, traduction d’une séparation souple des pouvoirs. Cette collaboration s’exprime par le fait que les deux organes politiques (exécutif et législatif) découlent l’un de l’autre, le gouvernement étant l’expression de la majorité parlementaire et ont des domaines d’actions communs[55].
Le fait que le régime parlementaire fournisse des chefs de gouvernement aux pouvoirs larges se justifie par deux raisons principales : la tendance contemporaine de la primauté de l’exécutif dans le nouveau régime parlementaire et la consécration constitutionnelle de l’affaiblissement du parlement dans le cadre du parlementarisme rationalisé.
« Aujourd’hui, le verrou de la séparation des pouvoirs dans la compréhension des régimes parlementaires qui reposait hier sur la collaboration et sur l’équilibre semble avoir cédé »[56] . Carlos-Miguel Pimentel y voit « une sorte de relique conceptuelle désormais vide de tout contenu, le plus grand mythe constitutionnel de la modernité libérale » ; Pierre Avril parle d’une de ces formules classiques « paisiblement répétées et pourtant incapable de rendre compte correctement de l’objet étudié ». Michel Troper et Francis Hamon considèrent eux aussi que la lecture classique du régime parlementaire reposant sur la collaboration et l’équilibre des pouvoirs ne présente « ni valeur logique, ni intérêt scientifique ». Puisqu’on assiste, de nos jours, à une domination du pouvoir exécutif sur le pouvoir législatif. Or le pouvoir exécutif dans un régime parlementaire est détenu par le chef du gouvernement. C’est ce qui explique la prépondérance de la compétence des chefs de gouvernement dans le régime parlementaire.
En France, en période de cohabitation, le régime politique français fonctionne comme un régime parlementaire. Aussi remarque-t-on que le chef du gouvernement en période de cohabitation dispose de larges pouvoirs dont  ne jouissaient pas véritablement les chefs de gouvernement en période de concordance[57]. Il est, alors au centre de la vie politique et administrative française. Il s’agit d’une position que lui offre la constitution de 1958. De la combinaison des articles 20 et 21 de la constitution, il résulte que « le Premier ministre dirige l’action du gouvernement »[58], lequel « détermine et conduit la politique de la nation »[59] et « dispose de l’Administration et de la force armée »[60] .
B-    Les chefs de gouvernement aux compétences restreintes.
On distinguera ici les subordonnés aux Chefs d’État (1) et les subordonnés au Parlement (2).
1-      Les subordonnés aux chefs d’État.
La subordination d’un chef de gouvernement à un chef d’État peut être juridique (a) eu politique (b).
a-      La subordination juridique.
Les lois fondamentales qui régissent les relations entre les pouvoirs publics constitutionnels organisent parfois la soumission du chef de gouvernement aux chefs d’État. C’est ce qui résulte, à titre illustratif, de la combinaison des articles 66 et 77 de la constitution togolaise.
En effet, l’article 66 est relatif à la nomination puis à la révocation du Premier ministre par le Président. Il laisse entrevoir une subordination politique du Premier ministre au Président de la République. L’article 77, quant à lui, révèle expressément cette subordination. Elle dispose que : « Sous l’autorité du Président de la République, le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ».
En dehors de la subordination juridique, il existe parfois une subordination politique.
b-     La subordination politique.
La subordination politique du chef de gouvernement au chef d’État est forte lorsque le chef d’État est issu d’un suffrage universel. Il en est ainsi parce que le chef d’État, dans ce cas dispose d’une légitimité populaire –que n’a pas généralement les chefs de gouvernement nommés– et à un programme politique à défendre. Cela se traduit par le quasi effacement du chef de gouvernement sur la scène politique par le chef d’État ; un effacement accentué lors que le chef de l’État est dans son premier mandat présidentiel[61]. Dans ce schéma, le chef du gouvernement ressemble beaucoup plus à un collaborateur du chef de l’État.
Au-delà de la subordination à un chef d’État, certains chefs de gouvernement sont soumis au Parlement.
2-      Les subordonnés au parlement.
La subordination de certain chef de gouvernement au parlement s’explique par l’obligation juridico-politique d’avoir une majorité parlementaire (a) et le contrôle parlementaire que subit leur gouvernement (b).
a-      L’exigence d’une majorité parlementaire.
La question ne se pose pas dans le régime parlementaire puisque pour être le chef du gouvernement, il faut avoir une majorité au parlement. Cependant, cette majorité obtenue parfois par le jeu des alliances et de coalitions des partis politiques est parfois précaire. En effet la coalition peut volée en éclat, suite à des divergences politiques ou, à cause des intérêts partisans. Cette situation rend le chef du gouvernent fragile puisque dans le souci de disposer d’une majorité au parlement, il doit ménager les députés.
Quant au régime présidentiel, contrairement à l’apparence, le chef du gouvernement fut-il chef d’État a besoin d’une majorité au parlement pour voter les lois dont il a besoin pour réaliser son programme politique. Voilà d’ailleurs pourquoi Réné Capitant affirmait que  gouverner, ce n’est plus seulement administrer dans le cadre des lois existantes mais gouverner c’est légiférer.
La disposition par le chef du gouvernement d’une majorité au parlement adoucit le contrôle de député sur son gouvernement.


b-      Le contrôle parlementaire.
Le contrôle du parlement sur les activités du gouvernement a une essence constitutionnelle. D’abord, cela s’explique par l’obligation faite au chef de gouvernement de présenter devant l’Assemblé nationale le programme d’action de son gouvernement avant son entrée en fonction[62]. Ce contrôle souvent demandé expressément par la constitution[63].
Dans les pays à forte tradition de commissions parlementaires et donc de contrôle parlementaire, le gouvernement à travers son chef associe, les députés à travers les commissions au prise de décision. Ce qui laisse entrevoir –quand ce procédé semble lié le gouvernement–  une sorte de subordination de l’exécutif au parlement.



[1] -Maurice Druon, Le pouvoir, 1965
[2] -Ecrivain et homme politique français, Maurice Druon est nommé le 05 avril 1973 ministre des affaires            culturelles par Georges Pompidou.
[3] - Il existe d’autres termes pour désigner les chefs de gouvernement selon les États :
Ø  Premier Ministre au Togo, au Sénégal, au Burkina-Faso, en France, en Grande-Bretagne etc…
Ø  Chancelier en Allemagne et en Autriche.
Ø  Ministre-président en Bulgarie, Lettonie, Wallonie etc…
Ø  Ministre d’État au Danemark, Monaco, Norvège et en Suède.
Ø  Président du Conseil des ministres en Italie, Liban, Pologne.
Ø  Président du gouvernement en Espagne, Croatie, Maroc, Russie, Serbie…
Ø  Ministre en chef : États et territoires de l’Inde, États et territoires de l’Australie et en Territoire britannique d’outre-mer.

[4] -Wikipédia, le chef du gouvernement, 11 janvier 2016 à 11 h 58min.
[5] -L’histoire moderne est celle qui va de la chute de Constantinople en 1453 à la fin du XVIIIème siècle.
[6] -Nous pouvons citer à cet effet les révolutions anglaises, américaines et françaises au XVIIIème siècle.
[7] -Il s’agit, ici, des chefs de gouvernement qui partagent le pouvoir exécutif avec un chef d’État, le plus souvent élu.
[8] - L'expression « chef d’État » vient du latin caput regni, la tête de l'État, issue de l'Ancien Régime, et faisant donc référence à une concentration du pouvoir.

[9] -L’exemple parfait d’un chef de gouvernement qui détient l’exclusivité du pouvoir exécutif est le Président des États-Unis. Il tire sa légitimité non seulement de son élection mais aussi de l’article 2 de la constitution du 04 mars 1789.
[10] -Si nous parlons ici de pouvoirs restreints, c’est par comparaison avec les autres chefs de gouvernement qui jouissent d’importantes prérogatives.
[11] - Les termes « Président de la République des États-Unis » sont à proscrire même si les États-Unis sont formellement une République.
[12] -Olivier Gohin, Droit constitutionnel, 2ème édiction, Lexis Nexis, p.1267
[13] -Ces élus sont selon la constitution américaine les « électeurs » mais en pratique, ils sont appelés « grands électeurs »
[14] -Les États-Unis sont une fédération composée de cinquante États fédérés.
[15] -Les grands électeurs ne peuvent être :
§  Ni sénateurs ou représentants, c’est-à-dire membres du législatif, ce qui garantit la séparation des pouvoirs, et donc l’indépendance du futur chef de l’exécutif puisque le législatif ne peut pas désigner l’exécutif dans un régime présidentiel.
§  Ni titulaire d’une fonction fédérale, c’est-à-dire membres de l’exécutif, ce qui assure l’indépendance de chaque grand électeur, et donc la sincérité du scrutin puisqu’il s’agit d’élire le futur chef de l’exécutif (art.2, sect.1§2 de la constitution américaine)
[16] -Olivier Gohin, Droit constitutionnel, 2è édition, p.1269.
[17] -Il s’agit précisément de l’art.2 sect. 1 § 1 
[18] - La notion de gouvernement, en droit américain, est strictement fonctionnelle et non organique.
[19] -Ils sont 15 depuis 2002.
[20] -Art.2, sect.2, § 1
[21] - Voir l’exemple de l’application du régime présidentiel au Bénin.
[22] -En Afrique du Sud comme dans tous les régimes parlementaires, le chef du gouvernement est désigné par les députés. Il est, généralement, le chef du parti majoritaire au parlement.
[23] -Il faut rappeler que les députés, quant à eux, sont élus directement par le peuple Sud-Africain. Donc, il est juste d’affirmer que le chef du gouvernement sud-africain est élu indirectement par son peuple.
[24] - Les avatars dont il est question, ici, sont les régimes politiques appliqués en France et dans une grande partie de l’Amérique du Sud.
[25] -Les deux grands partis politiques en Grande-Bretagne sont le parti conservateur et le parti travailliste.
[26] -Le cercle des membres influents proches de la Cour est appelé « le cercle magique »
[27] -Olivier Gohin, le droit constitutionnel du Royaume-Uni, 2è édition, p.1200
[28] -Le congrès de Wembley a eu lieu en janvier 1981.
[29] -Même si, en principe, il est reconduit chaque année sans que l’élection ne soit disputée.
[30] -C’est le cas en novembre 1990.En effet, c’est faute d’avoir été réélue, dès le premier tour, à la tête du parti conservateur  que Margaret Thatcher a démissionné de ses fonctions de Premier.
[31] -L’exemple du Premier-ministre français en période de cohabitation est illustratif.
[32] - On y trouve le Premier- ministre togolais, le Premier- ministre burkinabé, le Premier ministre français en période de concordance.
[33] -« Bundeskanzler » est l’expression allemande retenue pour désigner le Chancelier allemand.
[34] -Olivier Gohin, Droit constitutionnel, 2è édiction, Lexis Nexis, p.1225.
[35] -La Diète fédérale est l’institution représentative du peuple allemand tout entier. Elle siège à Berlin et son élection se fait à la proportionnelle personnalisée.
[36]-L’art.63 de la loi fondamentale du 23 mai 1949.
[37] - Le président fédéral, sans que la loi fondamentale le dise, est le chef de l’État. Il est élu sans débat par l’Assemblée fédérale (Bundesversammlung), assemblée ad hoc qui rassemble (versammeln) les Allemamds.
L’actuel président, Joachim Ganck est élu le 18 mars 2012.
[38] - Les als. 1 et 2 de l’article 63 de la loi fondamentale du 23 mai 1949.
[39] -Les propos du serment sont contenus dans l’article 56 de la loi fondamentale.
[40] -Il s’agit d’une pratique imposée par la loi fédérale notamment à l’alinéa 2 de l’art.65.
[41] - La France a connu, à ce jour, trois périodes de cohabitation : Jacques Chirac de mars 1986 à mai 1988 ; Édouard Balladur de mars 1993 à mai 1995 ; Lionel Jospin de juin 1997 à mai 2002.
La cohabitation est la période où le Président de la République et le Premier- ministre sont de tendances politiques opposées.

[42] -L’Hôtel Matignon est le lieu de résidence du Premier ministre français.
[43] -C’est le cas en 1993 où Jacques Chirac a proposé Éduard Balladur.
[44] - Voir l’article 66 de la constitution de la IV République du 14 octobre 1992.
[45] - Voir l’art.46 de la constitution en vigueur au Burkina- Faso.
[46] - Voir l’art 8 de la constitution en vigueur en France (1958).
[47] -Il n’est pas question, ici, de comprendre la responsabilité politique de ces gouvernants dans le sens d’un mandat impératif.
[48] -Les termes « Président de la République des États-Unis » sont à proscrire même si les États-Unis sont formellement une République.
[49] -Voir art.16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (1789)
[50] -SOMALI Kossi Franck, Institutions politiques comparées, p.10.
[51] -La constitution du 17 septembre 1789 qui est entrée en vigueur le 04 mars 1789.
[52] -Le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.
[53] -Olivier Gohin, le droit constitutionnel des États-Unis, 2è édition, LexisNexis, p.1277
[54] -Actuellement, il fonctionne aussi bien en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Belgique, en France (durant la période de cohabitation) pour ne citer que ces exemples.
[55] -Par exemple, l’initiative des lois qui n’est pas seulement l’apanage des parlementaire mais qui est aussi le propre du gouvernement.
[56] - SOMALI Kossi Franck, Institutions Politiques Comparées, p.7
[57] -La période de concordance est celle où le Président et le Premier ministre sont du même bord politique.
[58] -art 21, al.1er
[59] -art 20, al 1er
[60] -art. 20, al 2
[61] -Nous pouvons citer en France les exemples des gouvernements : Juppé (2005), Fillon (2007) et Ayrault (2012).
[62] -Voir art.78 de la constitution togolaise
[63] -Voir les arts. 24 et  84 respectivement de la constitution française et burkinabée

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